La Lorraine dans le temps

La Lorraine dans le temps

Moyenmoutier (Vosges)

Commune de l'arrondissement de St-Dié, canton de Senones, à 53 kms d'Epinal, 14 de St-Dié et 6 de Senones; située dans une vallée, à 811m d'altitude au seuil de la maison commune ; terrain : 1) terrain de transition dévonien, supérieur de la vallée de la Bruche; 2) grès et argile ; traversée par le ruisseau du Rabodeau ; sur le passage du chemin de grande communication n° 78, de Brouvelieures â St-Blaise-la-Roche ; sillonnée par 14274 mètres de chemin vicinal ordinaire et par 43217 de chemins ruraux reconnus. — Station de chemin de fer d'Etival à Senones. — Poste et télégraphe. Pop. : 4005 habitants, 660 maisons, 1062 électeurs, 21 conseillers municipaux. — Perception et recette municipale à Hurbache, résidence â St-Dié. — 2 sages-femmes. — Paroisse dépendant de la cure de Senones ; fête patronale le dimanche qui suit le 11 juillet, patron St-Hydulphe. — Population protestante, 7 habitants, pasteur à St-Dié. — Ecoles primaires de garçons, 185 élèves ; de filles, 196 élèves ; 5 mixtes, 269 élèves ; maternelles, 200 élèves. 6 bibliothèques, 914 volumes. Bureau de bienfaisance, 1614 frs de revenus annuels. Société de tir militaire ; fanfare. — Brigade de gendarmerie à Senones. 33 conscrits en 1886. 1 compagnie de sapeurs-pompiers, 130 hommes.

 

Revenus annuels de la commune 9104 frs, dont 813 frs en rentes 3 % sur l'Etat ; valeur du centime 167 frs 85; produit des 4 contributions 84844 frs, dont 16428 frs sur les patentes. Surface territoriale 3420 hectares, dont 1102 en terres labourables, 618 en prés, 388 en bois, 49 en jardins, vergers, chènevières, 86 en friches. Cultures principales : blé 4245 hectolitres, orge 48 hectolitres, avoine 3682 hectolitres, pommes de terre 69160 hectolitres. Valeur de la forêt communale 260000 frs. 1 carrière de pierres à aiguiser. Industrie : 1 blanchisserie de tissus de coton, 215 ouvriers ; 4 tissages mécaniques, 862 métiers, 731 ouvriers ; ces établissements existent depuis 1880. Principaux commerces : 1 marchand en gros ; 40 débitants ; 8 épiceries, merceries et étoffes ; 1 marchand de poterie, faïence et vaisselle.

 

 

Hameaux : Chapelle (la), 301 habitants, 78 maisons ; Himbaumont, 235 habitants, 50 maisons ; Pair (le), 890 habitants, 83 maisons ; Prelle (la), 184 habitants, 25 maisons ; Ravine, 18 habitants, 13 maisons ; St-Blaise, 811 habitants, 68 maisons.

 

Ecarts : Aselle (aux), 17 habitants, 2 maisons ; Bouchions (aux), 7 habitants, 2 maisons ; Quatre-Chemins (aux), 4 habitants, 2 maisons ; St-Benoît, 8 habitants, 2 maisons.

 

Fermes : Champ-Haut (au), 5 habitants ; Huisses, 9 habitants ; Maison-Jeannot, 8 habitants ; Mamoine, 10 habitants ; Pont-des Voitines, 3 habitants ; Tambour, 5 habitants.

 

Curiosités naturelles. — La Haute-Pierre, située an nord, sur une montagne, à un kilomètre da centre. Cette roche de pierres de sable a au moins 25 mètres de hauteur et arrive à niveau du plateau de la montagne ; l'histoire dit que Aubert de Parroye avait bâti un château fort sur cette roche.

Un étang.

 

Ancienne population : 1710, 63 habitants ; an XII, 1607 habitants ; 1830, 2085 habitants ; 1847, 2318 habitants ; 1867, 2784 habitants —

 

Anciennes divisions : 1710, bailliage de St-Dié ; 1751, bailliage et maîtrise de la même ville, coutume de Lorraine ; 1790, district de St-Dié, canton de Senones. — Spirituel : Doyenné de Salm, diocèse de Toul, évêché de St-Dié.

 

 

Histoire — Le village de Moyenmoutier (Medianum monasterium), autrefois chef-lieu d'une mairie, doit son origine à l'ancienne abbaye de l'ordre de St-Benoît de la congrégation de St-Vanne et de St-Hidulphe qui y existait autrefois, et qui fut l'une des plus riches des Vosges. Les colonies de religieux qui vinrent s'établir dans ces lieux à la suite de saint Hidulphe, défrichèrent les terrains qui composaient encore, avant la Révolution, le vaste territoire de Moyenmoutier.

Quant à l'abbaye, elle fut fondée, vers 671, par saint Hidulphe, archevêque de Trèves, qui, à l'exemple de saint Dié et de saint Gondebert, vint chercher la solitude dans ces lieux. Son dessein était d'y vivre en ermite ; mais plus tard, un grand nombre de disciples étant venu se réunir à lui, il bâtit un monastère et quatre églises, deux dans l'intérieur du monastère, une troisième en dehors pour les étrangers, et une quatrième sur le monticule au midi de l'abbaye. Le monastère fondé par saint Hidulphe prit le nom de Moyenmoutier (Medianum mo-nasterium), à cause de sa situation entre ceux de St-Dié, de Senones, d'Etival, de Bonmoutier et d'Offonville.

Sous le règne de Charlemagne, les religieux de Moyenmoutier ne pouvant s'accorder sur le choix d'un abbé, ce prince leur envoya un archevêque, nommé Fortunat, qui y mourut en 825. Ce fut sous son gouvernement que Moyenmoutier acquit le premier degré de splendeur. Le roi Lothaire étant en guerre avec Charles-le-Chauve et Louis-le-Germanique, demanda à l'abbé de Moyenmoutier les trente soldats armés que lui devait le monastère. L'abbé n'ayant pu fournir cette réquisition, Lothaire donna son abbaye à Régnier, duc de la province, qui, pour lever le nombre de troupes qui lut était demandé, dissipa les biens du monastère et s'appropria 1511 familles de serfs qui lui appartenaient. Zwintibold, donna Moyenmoutier au comte Hillin, qui chassa le peu de religieux qui y étaient demeurés et mit à leur place des chanoines (896), que Frédéric, duc de Bar, remplaça, 70 ans plus tard, par des religieux. En 985, l'abbaye de Moyenmoutier établit pour ces derniers une école de grammaire qui devint célèbre.

 

 

De 910 à 963, les bandes des Huns pénétrant en Lorraine, brûlèrent l'abbaye de Moyenmoutier.

Cette abbaye, après avoir été soumise aux rois d'Austrasie, â Charlemagne et à ses successeurs, passa aux ducs de Lorraine, qui y exercèrent les droits régaliens sous l'autorité des empereurs. Elle eut, en outre, des seigneurs voués qui jouissaient d'une certaine puissance. L'un d'eux, Aubert de Parroye, bâtit une forteresse près de la Haute-Pierre, roche escarpée située en face de l'abbaye, et dont on voyait encore quelques vestiges à la fin du siècle dernier. Le due Mathieu II, irrité de cette entreprise, attaqua cette forteresse et s'en rendit maître après un assez long siège. II parait cependant qu'Aubert obtint la permission de rétablir ce château, à condition qu'il en fasse hommage au duc, car il y eut encore, dans la suite, d'antres seigneurs de la Haute-Pierre. Au commencement du siècle dernier, la mense abbatiale valait 4000 livres, la mense conventuelle 2000.

En 1784, les biens de la mense abbatiale de Moyenmoutier furent unis à la grande prévôté de St-Dié, pour former la dotation du futur évêché de St-Dié.

En 1572, le maire, les échevins, bonshommes et habitants du ban de Moyenmoutier, convoqués au siège de justice au-devant de l'abbaye, rendirent une sentence qui condamnait à mort un porc qui avait dévoré un enfant. Cette sentence fut exécutée et l'animal pendu.

Les habitants de Moyenmoutier jouissaient autrefois de droits particuliers. Quand une femme accouchait d'un enfant provenant d'un mariage légitime, le mari pouvait, seul on accompagné de son voisin, pécher pendant trois jours dans le Rabodeau et même vendre du poisson pour subvenir à l'entretien de l'accouchée ; mais il était obligé, préalablement, d'aller l'offrir au couvent où on le lui payait au prix fixé en pareille occasion, sinon il était libre de le vendre partout ailleurs. En outre, il avait le droit de se présenter au couvent pour y recevoir un pain de trois livres et un pot de vin.

L'église de Moyenmoutier, construite de 1740 à 1778, est un des plus remarquables monuments religieux des Vosges ; elle est, dit-on, l'œuvre d'un nommé Pierson, de Senones. Elle renferme encore les anciennes boiseries et les stalles des religieux. On remarque, sur un des autels, un reliquaire contenant les ossements do saint Hidulphe. Dans la chapelle du cimetière, on a transporté le tombeau en pierre de St-Hidulphe. La pierre fermant ce tombeau très ancien a pour tout ornement une grande croix en relief.

 

Quant à l'abbaye, qui fut supprimée en 1790, ses bâtiments sont occupés par une blanchisserie. On montre néanmoins encore la salle dans laquelle l'abbé rendait la justice.

On conservait, dans l'abbaye de Moyenmoutier, un assez grand nombre d'anciens manuscrits dont la plupart venaient du prieuré du Saint-Mont. On y remarquait la châsse qui renfermait les reliques de saint Hidulphe, couverte de lames d'argent ouvragées, représentant le baptême de sainte Odile.

On raconte que le cardinal Humbert, ayant eu à soutenir une dispute sur la réalité des reliques de saint Etienne, fit venir de la bibliothèque de Moyenmoutier, dont il était abbé, les livres de saint Augustin où l'invention de saint Etienne est racontée. Ces ouvrages ne se trouvaient dans aucune autre bibliothèque du pays.

Les débris de la riche bibliothèque de Moyenmoutier ont servi à former la bibliothèque publique d'Epinal.

Il y avait, sur le territoire de Moyenmoutier, l'ermitage de Malfosse, dent il est parlé précédemment.

Cette chapelle de Malfosse à 4 kms du centre, est située au nord-est dans la forêt communale de Moyenmoutier ; on y vient en pèlerinage.

La mairie et l'école des garçons ont été construites en 1882 ; les écoles des filles et maternelle eu 1884 ; les écoles mixtes des hameaux : Pair en 1877, St-Prayel en 1877, St-Blaise en 1868, Himbaumont en 1848, la Chapelle en 1859.

Ce qui reste des anciennes archives de l'abbaye eut déposé aux archives des Vosges (série H).

 

 

Les pièces concernant la mense abbatiale ont été classées et inventoriées dans le fonds du chapitre de St-Dié (série G, 827-832). Les archives anciennes de la mairie ne renferment que des pièces du XVIIIème siècle. Les actes de bâptème mariage et sépultures commencent en 1812.

Helvide, mère du pape Léon IX, se retira en 1012 dans le monastère de Moyenmoutier et y mourut en 1046.

 

Source : Département des Vosges par Léon Louis et Paul Chevreux - 1887  - bibliothèques de  Nancy.

 

 

 

 



12/03/2018
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