La Lorraine dans le temps

La Lorraine dans le temps

la Lorraine sous Léopold - 2.18 la chasse

A l’exempte de ses ancêtres, le duc Léopold considérait la chasse comme un délassement aussi noble qu’inoffensif, mais il disait qu’elle ne convenait qu’aux princes et aux seigneurs. Il voulait empêcher ses sujets de trop s’y adonner ; de perdre de vue par ce divertissement leurs affaires, leur commerce et leurs travaux journaliers et de préparer la ruine de leurs familles. Il n’avait rien de plus à cœur que d’affermir une bonne discipline et une bonne police dans ses États ; les ordonnances réglementaires du comte de Carlinford lui parurent insuffisantes pour atteindre ce but. Il les corrobora par de nouvelles dispositions d’autant mieux motivées que les délits de chasse étaient rarement réprimés par les officiers chargés du soin de les poursuivre.

 

 

Son ordonnance du 29 juin 1698 réorganise le corps de sa vénerie. Elle interdit aux grands gruyers, aux gruyers par­ticuliers, aux contrôleurs de gruerie, aux forestiers et aux autres préposés à la conservation de ses forêts, bois et buissons, la connaissance des faits de chasse, établit un directeur général et surintendant de ses chasses, dans toute l’étendue de son duché, le comte de Viange, conseiller d’Etat, maréchal de Lorraine et grand veneur, et institue dans chaque bailliage un capitaine des chasses placé sous les ordres du grand veneur et, dans chaque prévôté, des officiers garde-chasses subordonnés au capitaine. Cette ordonnance défend aux gardes forestiers de porter des armes à feu dans l'exercice de leurs fonctions et les autorise seulement à s’armer de « brins d’estock ». Les contraventions y sont punies d’amendes qui peuvent s’élever jusqu’à 7 000 francs quand les délinquants sont des ecclésiastiques, des gentilshommes ou des nobles. Il est défendu de chasser le cerf, la biche ou le faon, de même que le sanglier, qui était alors peu commun en Lorraine, tandis qu’à présent il infeste nos bois et nos campagnes et soulève contre lui toutes les popula­tions agricoles. On doit respecter les jeunes levrauts, les jeunes chevreuils, les œufs de perdrix, de gelinottes et de faisans. Cette dernière espèce de volatile a disparu à peu près en Lorraine. Les armes brisées sont prohibées : on ne peut ni les avoir dans son domicile ni les porter en cam­pagne. Les armuriers et les serruriers qui les fabriquent ou les vendent sont punis du fouet et de cinq années de ban­nissement.

Léopold, jaloux de ses plaisirs, interdit à toutes personnes la chasse dans les bois, haies, buissons, garennes, plaines, campagnes et montagnes ainsi que les étangs, les ruisseaux et rivières de ses domaines, à peine de cent francs d’amende pour la première fois, de deux cents francs pour la seconde, et, pour la troisième, de punition corporelle contre les ro­turiers de perte et de privation de leurs offices      contre les fonctionnaires et de cinq cents francs d’amende contre les ecclésiastiques, gentilshommes ou nobles. Dans ce cas comme dans bien d’autres, le clergé avait le pas sur la noblesse et la roture.

Mais il faut stimuler le zèle toujours un peu tiède des garde-chasses. Sur la proposition du marquis Louis de Beauvau, son nouveau grand-veneur, Léopold les exempte des charges publiques, à l’exception de la subvention et des autres impôts ordonnés par lui, leur alloue le tiers des amendes prononcées en matière de chasse et fixe à deux francs l’amende applicable aux individus qui manqueraient aux chasses commandées pour la destruction des animaux nuisibles.

La passion des Lorrains pour la chasse allant croissant, quoi qu’on fasse, le code fut remanié par l’édit de janvier 1729. Cet édit crée les capitaineries des chasses de Nancy, Bar, Lunéville, Saint-Mihiel, Etain, Pont-à-Mousson, Sarreguemines, Épinal, Mirecourt et Neufchâteau. Chacune disposait d’un ou plusieurs lieutenants et un nombre suffisant de gardes pour veiller à la police de la chasse et faire observer les règlements. Il fut enjoint aux magistrats de juger avec la plus grande rigueur des délits de chasse et de ne diminuer ni modérer sous aucun prétexte les punitions et les amendes. L’édit défend à toutes personne, de chasser entre le 15 mars et le 15 août.

D’après ledit de 1729, on ne peut se servir de filets ni chasser la nuit, ni faire des pipées (1) dans les forêts, ni prendre les nids de grives. Pas plus que les gardes, les lieutenants et les brigadiers des citasses n’ont le droit de porter le fusil, mais il leur est loisible de se munir d’une paire de pistolets d’arçon pour leur sûreté personnelle. Les paysans ne doivent pas laisser rôder leurs chiens avant de leur avoir fixé au cou un billot pendant sur les jambes, « si mieux ils n’aiment leur faire couper un jarret ». Ces pauvres animaux continuaient à être plus mal menés que de nos jours où on se contente de les museler, de les tenir en laisse et de les soumettre à la taxe municipale.


C’est avec cet ensemble de mesures que Léopold espérait maîtriser les instincts cynégétiques des lorrains.Les hauts-justiciers préférant la chasse aux distributions ducales de venaison, le grand-veneur désigne à ceux dont les domaines sont enclavés dans les plaisirs du duc des cantons dépendants d’autres biens de sa Couronne, pour qu’ils puissent y chasser en tonte liberté. Du reste aucun vassal, aucun sujet ayant droit de chasse, ne peut se montrer avec un fusil hors des terres sur lesquelles il exerce ce droit.

 

 



25/11/2020
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi