La Lorraine dans le temps

La Lorraine dans le temps

Les Etats de Lorraine sous Léopold - 2.7 La subvention

 

Après avoir fait construire un pont dans le grand fond des bois de Haye, et casser les rochers qui rendaient très difficile la chaussée entre Toul et Nancy (1705), Léopold (1706) ordonna aux magistrats composant les deux Chambres des comptes de Lorraine et de Bar, de se transporter dans les prévôtés et cantons qu'on leur désigna, afin de s'assurer personnellement :

- de la situation de chaque lieu, paroisse, annexe, succursale ; des seigneurs haut-justiciers, fiefs, droits et redevances, quotité de dîmes, usages communaux, usines, terres, prés, pâturages, pâquis, friches et terres incultes ;

- du nombre d'habitants, nobles, privilégiés, laboureurs, artisans, manouvriers, propriétaires ou non ;

- de la qualité du sol et de sa fécondité ;

- des diverses productions et débouchés pour le commerce ;

- du nombre des animaux, bêtes de travail, troupeaux ;

- de l'industrie ;

en un mot, d'étudier toutes les choses nécessaires à connaître pour asseoir et distribuer avec le plus d'équité possible l'impôt sans cesse grandissant ainsi que les charges publiques. Ce grand travail fut exécuté avec beaucoup de soin et reçut le nom de pied certain. Il servit de base, pour la répartition de la taille principale, appelée subvention (1). A cette subvention venaient se joindre d'autres impositions créées par la France, tels que le papier timbré, le contrôle, la ferme (2) des tabacs, etc., que Léopold eut soin de conserver. Ce duc fit frapper à son effigie des doubles léopolds, des léopolds et des demi-léopolds, en or et en argent, qui avaient le poids et la valeur des louis d'or et écus en argent de France ; des testons, demi-testons et quarts qu'il fit lever sur la Lorraine et le Barrois pour subvenir aux charges et aux besoins de l'Etat.

La subvention fut introduite par les Français. On rechercha la quantité de terres et de prés nécessaires en moyenne pour occuper et nourrir six chevaux de labour, et on appela cette quantité une charrue. Autant de fois on trouva cette quantité dans un village, autant on compta de charrues. Chaque charrue était imposée de trente à quarante livres ; c'est ce qu'on appelait pied certain ou impôt réel. Une demi-charrue paya moitié. On considéra ensuite que chaque charrue pouvait occuper de quatre à cinq manœuvres, et le pied certain pour le manœuvre fut de 7 à 10 livres.

 

 

Il y avait en Lorraine, au commencement du XVIIIème siècle, 1.245.107 jours de terres labourables et cultivées à 250 verges le jour ou arpent ; 292.986 jours de friches ;8.449 jours de vignes ; 509.502 fauchées de prés et 72.579 de prés appartenant aux communes ; 1.383.130 arpents de bois : total, non compris la superficie des villes, villages, chemins, rivières, lacs et étangs : 3.511.843. Il y avait aussi 124.595 chevaux ; 51.170 bœufs ; 153.852 vaches ; 315.768 brebis et moutons ; 148.403 porcs. Le nombre des laboureurs était de 21.819; celui des artisans, manœuvres, etc., de 52.974 feux contribuables sur lesquels on imposa, pour l'année 1712, 1.143.000 livres.

Voici pendant plus d'un demi-siècle la progression de cet impôt, au cours de Lorraine (24 livres de France faisant 31 de Lorraine). — En 1700, 800.000 livres ; — de 1701 à 1706, 823.000 livres ; — de 1707 à 1711, 1.143.000 livres ; on comptait alors environ 75.000 feux contribuables. — En 1715-16, 1.238.202 livres ; — en 1717-18, 1.300.000 livres ; — en 1719-20, 1.305.000 livres ; — en 1721, 1.550.000 livres ; — en 1722, 1.600.000 livres ; — en 1724, 1.615.620 livres. Cette année, on imposa en sus, pour les ponts-et-chaussées, 100.000 livres. Cet impôt sera poursuivi par la suite. En 1725, on ajouta 100.000 livres sur les blés ; les impositions furent alors de 1.815.621 livres. Même somme pour 1726. De 1727 â 1737,1.915.620 livres. En 1738, on imposa, pour supplément de fourrages aux troupes, 308.115 livres, et le total des impositions fut de 2.208.415 livres, dont trois cinquièmes sur la Lorraine et deux cinquièmes sur le Barrois. En 1739, 2.180315 livres, — en 1740, 2.517.710 livres ; — en 1711, on imposa 50.000 livres de France pour les fortifications de Bitche, continuées les années suivantes. En 1742, les impositions montèrent à 2.681.618 livres, compris l'habillement des milices du pays. Elles s'élevèrent en 1758 jusqu'à 3.700 971 livres...

 

 

 

(1) Subvention, nom tiré du latin que Louis XIV donna à l'impôt

(2) La ferme était une compagnie qui, moyennant une somme fixée d'avance par un bail de plusieurs années, achetait du gouvernement le monopole de plusieurs marchandises et de plusieurs services publics, le droit de sous-louer de nombreuses propriétés foncières, de recouvrer de nombreux impôts qu'elle levait avec l'assistance publique.... C'étaient, entre autres, le privilège exclusif de la vente des sels et tabacs, les droits de contrôle, de timbre, de greffe, d’amortissement, la foraine, et enfin les droits seigneuriaux appartenant au Domaine particulier. — La ferme se substituait au souverain et pouvait, par exemple, tirer la dîme à Badonviller, exploiter les Grands-Moulins de Nancy et les forges de Moyeuvre, pécher l'étang de Lindre, lever les amendes champêtres et envoyer les paysans à la corvée seigneuriale dans plus de cent villages.

 

 



12/07/2020
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